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Vie privée et licenciement

Des violences conjugales peuvent-elles justifier le licenciement d’un salarié ?

Les événements relevant de la vie privée ont parfois une incidence telle en entreprise qu’ils peuvent justifier un licenciement. Mais sauf s’ils se rattachent à la vie de l’entreprise, l’employeur ne peut procéder qu’à un licenciement pour motif personnel non disciplinaire (cass. ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-40803, BC n° 3). En pratique, il peut licencier le salarié si le fait invoqué crée un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise (cass. soc. 17 avril 1991 n° 90-42636, BC V n° 201 ; cass. soc. 30 novembre 2005 n° 04-41206, BC V n° 343). Pour apprécier l’existence du trouble, les juges peuvent tenir compte de la nature des fonctions du salarié et de la finalité propre de l’entreprise (cass. soc. 20 novembre 1991, n° 89-44605, BC V n° 512).

Et la jurisprudence se montre assez stricte, comme le montre encore une fois une affaire jugée le 1er février 2017.

Elle concerne un salarié qui travaillait en qualité de garde-malade dans une association chargée de l’accueil et de la prise en charge de personnes handicapées mentales ou souffrant de troubles de comportements. Fin 2011, son employeur l’a licencié suite à des violences exercées sur son épouse ayant donné lieu, semble-t-il, à garde à vue.

Mais voilà : les juges du fond ont condamné l’employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec à la clef 15 000 € de dommages-intérêts.

En cassation, l’employeur a plaidé sa cause en argumentant à nouveau sur le trouble objectif causé au sein de l’entreprise. Il avançait, notamment :

-l’organisation d’un soutien psychologique au sein de l’association, pour lequel il avait convoqué tout le personnel pour une réunion avec le psychologue de la médecine du travail ;

-la mise en place d’une tournée auprès des résidents du foyer pour expliquer les agissements ;

-compte tenu des fonctions du salarié et de la finalité de l’entreprise, le trouble créé par les actes de violence commis par le salarié, qui aurait généré un environnement de craintes, d’angoisse et d’insécurité ressenti par les résidents, au demeurant psychologiquement vulnérables.

Mais la Cour de cassation a suivi la cour d'appel, estimant que les éléments produits par l’employeur ne permettaient pas de caractériser l’existence d’un trouble objectif au sein de l’association.

On en revient donc aux éléments du dossier.

Et en l’espèce, la cour d'appel avait constaté que l’employeur ne justifiait que d’une convocation du personnel pour une réunion avec le psychologue du travail, une facture de ce dernier pour un débriefing de 2 h 30 (237,50 €), un document de liaison indiquant que deux salariés « passeront sur les unités pour donner une explication et mettre des mots sur la situation de X. ».

Pour les juges d’appel, sans nier l’émoi pouvant être suscité par la révélation de ce type de faits, ces éléments ne prouvaient nullement l’existence d’un trouble objectif au sein de l’entreprise.

Cass. soc. 1er février 2017, n° 15-22302 D

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